Abstract
Il va sans dire que le confinement, décrété dans plusieurs pays comme mesure drastique de lutte contre la pandémie du coronavirus, a ouvert un champ d’exploration inédit pour les chercheurs en sciences humaines et sociales. Afin d’en explorer l’impact, psychologique pour notre part, sur les liens des familles confinées sous le même toit, nous avons mis en place « Mon journal de confinement », une recherche de trois mois couvrant les périodes de confinement et de début du déconfinement en Tunisie. Cet article interroge en particulier le devenir d’une intimité mise à rude épreuve par la situation de confinement en famille chez de jeunes adultes. Dégustant, souvent à cet âge, les prémices d’une indépendance adulte en chantier, ces jeunes, contraints de re-cohabiter avec parents et fratrie durant de longues journées, tiennent un journal où ils expriment leur adaptation et leur résilience à la fois au climat général anxiogène mais aussi à celui de leur famille. Le vivre-ensemble familial apparaît alors comme teinté d’ambivalence, de sentiments contradictoires, d’expériences inédites, de créativités individuelles et collectives mais aussi de sens « perdu, trouvé, créé » de l’unité et de l’intimité. L’article tentera précisément de comprendre, à travers le prisme de la psychanalyse familiale, comment ces jeunes composent et résilient au sein de diverses aires de l’intimité passant par différentes configurations de lien : parento-filial et fraternel à l’intérieur de la famille et, au-delà, ceux amical, amoureux, familial plus large et social/virtuel. Cette investigation, extraits de journaux à l’appui, révèlera, au gré du croisement des réalités psychique et relationnelle, une quête continue jamais acquise ni évidente, du juste dosage entre l’investissement d’aires de l’intime et du partagé afin d’y puiser les ressources nécessaires à « digérer » l’inédit et l’inquiétant qui lui est corrélé.