Abstract
A partir d’une réflexion de Hannah Arendt sur l’impact des lois pour résoudre le problème du racisme et de la ségrégation raciale aux États Unis, cet article interroge le rapport entre droit et pauvreté chez les femmes qui sont mères célibataires en Tunisie. Le but est de démontrer que la discrimination politique et le non-respect des droits des femmes déterminent leur pauvreté. L’article nait d’un long terrain de recherche en Tunisie. Il s’appuie sur les expériences de trois femmes qui décrivent leurs conditions de détresse matérielle et l’absence de formes d’aide et de soutien de la part de l’État. Dans ce cadre, plutôt que sur l’analyse de facteurs sociologiques (tels que le travail ou l’éducation), l’attention est posée sur les conséquences de la non application de la loi sur l’attribution du nom patronymique paternel (loi 75/98) et de l’accès limité des femmes aux services administratifs. L’article se penche sur l’implication des institutions aussi bien que des associations locales et des ONGs étrangères dans la promotion de projets qui n’assurent ni l’assistance juridique ni l’information sur les droits des femmes. En effet, trop souvent on ne propose aux femmes en détresse que des formations professionnelles et de l’aide psychologique, c’est-à-dire des mesures qui peuvent être bénéfiques pour certaines mais qui n’ont pas un impact global sur la condition des mères célibataires. Enfin, l’analyse se concentre sur le respect de certains droits de l’homme tels qu’ils sont posés dans les conventions internationales dont la Tunisie est signataire et qu’elle a ratifié. Les droits de l’homme se révèlent un outil pour mesurer les limites de l’accès des femmes qui sont mères célibataires à la citoyenneté et expliquer la marginalisation qui cause leur pauvreté.