الملخص
L’article vise à proposer une lecture de la pauvreté dans la Tunisie coloniale au prisme de l’alimentation et des boissons. En utilisant les sources judiciaires, hospitalières et journalistiques, nous tentons de prouver tout d’abord que les autorités coloniales répriment davantage les consommations d’alcool des classes les plus populaires, désignées selon des acceptions et des termes différents selon les administrations. En agissant différemment selon les profils socio-économiques, les autorités contribuent également à fabriquer à leur échelle les classes sociales. Au-delà du comportement de l’administration, les boissons alcoolisées sont également des marqueurs de classe dans les représentations coloniales, notamment dans les sources littéraires francophones. Ainsi les élites sont en partie définies par leur capacité à boire certains alcools forts et importés, lorsque les individus les plus pauvres sont réduits à boire du vin bon marché produit localement, voire du lagmi. Dans les représentations coloniales, comme dans les politiques répressives, les boissons alcoolisées alimentent donc une certaine vision, voire une définition de la pauvreté.